I.- Comme nous l’avons exposé plus haut, les proverbes sont constitués par de courtes phrases faciles à retenir. Par quels moyens.
a/ Le plus souvent on y parvient par l’emploi de la rime.
1) qui peut être dans deux mots de la même phrase. La place de ces mots rimés est extrêmement variable.
Parfois le premier mot rime avec le second :
Lo bò trắng răng
Il s’inquiète de ce que le boeuf conserve ses dents blanches.
(et n’ait personne pour les lui laquer ; se dit des personnes qui s’inquiètent des choses futiles).
Le second mot peut rimer avec le troisième :
Lắm thóc nhọc xay
Qui a beaucoup de paddy aura beaucoup de peine pour le décortiquer.
Le second mot peut aussi rimer avec le quatrième :
Tốt danh hơn lành áo.
Bonne réputation vaut mieux que beaux habits.
2) Les proverbes se présentent aussi sous forme de couples de vers. Dans ce cas, le dernier mot du premier vers peut rimer soit avec le premier mot du second vers :
Khôn cho người rái
Dại cho người thương.
Le sage donne l’exemple aux autres
L’ignorant doit accepter de l’être pour être toléré.
soit avec le second mot du second vers :
Lấy vợ xem tông
Lấy chồng xem giống .
Avant de prendre femme, on doit s’enquérir de ses aïeux, Avant de prendre mari, on doit s’enquérir de sa race.
soit avec le troisième mot du second vers :
Một miếng giữa làng
Bằng một sàng xó bếp.
Un morceau au milieu du village
Vaut un panier plein au coin de la cuisine.
soit avec le quatrième mot du second vers :
Sống vì mồ mả
Không sống vì cả bát cơm.
On vit grâce à l’influence des tombeaux
Et non uniquement grâce au bol de riz.
soit avec le cinquième mot du second vers :
Biết thì thưa thốt
Không biết thì dựa cột mà nghe.
Parle si tu sais,
Mais si tu ne sais pas, appuie-toi à la colonne et écoute.
soit enfin avec le sixième mot du second vers :
Một cây làm chẳng nên non,
Ba cây chụm lại nên hòn núi cao.
Un arbre isolé ne fait pas une colline
Mais trois arbres rassemblés font une haute montagne.
b/ Quelquefois les proverbes ne sont pas rimés. Même dans ce cas, ils sont faciles à retenir grâce à deux moyens soit parralléisme entre les deux membres de phrase
Giầu điếc sang đui
Le riche devient sourd et le puissant devient aveugle.
(pour ne pas écouter les demandes de secours des pauvres et ne pas reconnaître les amis restés dans l’obscurité)
No nên Bụt
Đói nên ma
Rassasié, on devient Bouddha
Affamé, on devient un diable malfaisant.
soit une image frappante :
Chó cắn áo rách
Le chien aboie après les habits déchirés
Máu loãng còn hơn nước lã
Du sang dilué est préférable à de l’eau pure.
Ăn cháo đái bát
Il pisse sur le bol dans lequel il vient de manger la soupe.
II.- Il convient de distinguer les proverbes des locutions (thành ngữ) qui n’expriment ni un précepte de morale, ni une observation quelconque. Ce sont des expressions toutes faites, qui viennent spontanément à la bouche dès que l’homme du peuple veut exprimer une idée, parce que ces expressions sont imagées, pittoresques, et faciles à retenir et à redire. Exemples :
D’une région qui possède de riches ressources, il dit :
Tiền rừng bạc bể
De l’argent plein les forêts et les mers
Un médisant est comparé à :
Miệng hùm nọc rắn
Gueule de tigre, venin de serpent.
Voulant situer un malfaiteur dans la hiérarchie de cette classe méprisable, il émet ce jugement :
Đầu trộm đuôi cướp
À la tête des voleurs, à la queue des pirates.
L’ignorant est raillé cruellement par cette comparaison :
Dốt đặc cán mai
Son ignorance est aussi compacte que le manche d’une pioche.
Deux vieux amants sont définis comme étant :
Già nhân ngãi non vợ chồng
Plus que des amants, mais moins que des époux.
Les paroles aigres douces échangées entre les membres d’une famille désunie semblent être tantôt légères et tantôt lourdes :
Tiếng bấc tiếng chì
Paroles de sureau et paroles de plomb .
etc, etc .
Une étude poussée des locutions serait très utile à faire pour mettre en lumière les nombreuses et très ingénieuses figures de rhétorique qu’emploie l’homme du peuple. Mais comme notre but vise essen- tiellement à faire connaître au lecteur étranger la psychologie et les coutumes du peuple Vietnamien, nous sommes obligé de nous cantonner à l’étude des proverbes, un champ d’étude suffisamment étendu pour accaparer toute notre attention.
III.- Le proverbe, avons-nous dit, enseigne. Quoi ? D’abord des préceptes de morale. Ensuite des faits d’expérience tirés de l’observation du comportement psychologique des hommes, des faits sociologiques ou des phénomènes naturels. Nous diviserons donc les proverbes en quatres catégories :
1. Préceptes de morale
2. Observations psychologiques
3. Observations sociologiques
4. Observations de faits naturels.