Phan Đình Phùng

21 Tháng Năm 20143:37 SA(Xem: 6315)

P H A N Đ Ì N H P H Ù N G

(1847 – 1895)

 

Originaire du village de Đông Thụ, province de Hà Tĩnh. Reçus licencié en 1876 puis premier docteur en 1877.

 

A la mort de Tự Đức en 1883, les régents Nguyễn Văn Tuờng et Tôn Thất Thuyết déposèrent l’héritier du trône Dục Đức en faveur de Hiệp Hòa. Phan Đình Phùng s’opposa à cette révolution de palais et fut révoqué. L’année suivante, il fut appelé à servir comme délégué administratif à Hà Tĩnh. En 1885, les régents attaquèrent par surprise la Résidence Supérieure de Huế, mais furent vaincus. L’empereur Hàm Nghi dut s’enfuir. Lorsque le cortège impérial arriva à Quảng Bình, Phan Đình Phùng se présenta devant l’empereur qui le chargea de diriger le mouvement de résistance contre l’envahisseur.

 

Phan Đình Phùng installa son quartier général dans sa province natale, une région montagneuse très accidentée. Il put y tenir dix années entières, malgré les attaques incessantes des Français qui avaient mis sur le trône l’empereur Đồng Khánh à la place de l’empereur déchu Hàm Nghi.

 

Les Français cherchèrent à obtenir la soumission du farouche résistant par l’intermédiaire du fameux Hoàng Cao Khải qui serait plus tard nommé vice-roi du Tonkin. On trouvera ci-dessous la correspondance échangée entre les deux anciens camarades de village (Giai thoại làng Nho I , p.150).

 

Lettre de Hoàng Cao Khải à Phan Đình Phùng.

 

 A Son Excellence Phan, premier lauréat, mon concitoyen,

 

Il y a déjà dix-sept ans que nous nous sommes quittés. Notre vie a vu les champs de mûrier se transformer en océan, et la route poudreuse du Nord au Sud nous séparer. Quoique nous ayons suivi des chemins différents, nous nous rejoignons souvent en rêve.

 

Depuis que vous levâtres l’étendard de la Résistance, votre patriotisme ardent a été reconnu de tout le monde. Lorsque je leur parlais de vous, les mandarins français ne témoignaient que du respect à votre égard. Aussi bien votre patriotisme force l’admiration même des cœurs étrangers.

 

A la chute de la Capitale, lorsque le char imprérial fut obligé de s’aventurer hors du Palais, vous avez très bien fait d’appeler le peuple à la résistance. Personne ne pouvait y redire. Mais depuis, la situation a changé complètement, et les gens les moins instruits, les moins intelligents savent qu’il n’y a plus rien à faire. Vous qui êtes un sage, comment ne le sauriez-vous pas ? Me plaçant à votre point de vue, je m’imagine le raisonnement que vous avez du faire : “Faisons d’abord notre devoir, et mettons-y toutes nos forces. Car il appartient à l’homme de faire son devoir, si le succès dépend du Ciel. Ma vie est promise au service du pays jusqu’à ce qu’elle s’éteigne.”

 

Oui, ce raisonnement est admirable, mais il ne tient pas compte des malheurs épouvantables qui s’abattent sur notre contrée natale, et qui me serre le cœur. Plus d’une fois, j’ai voulu soumettre à votre éminent jugement mes idées étroites, mais à peine avais-je étendu la feuille de papier et préparé l’encre que le pinceau me tombait toujours des mains, avec un soupir. Pourquoi ? Parce que je savais que je ne pourrais pas remuer votre cœur, aussi ferme que le fer et la pierre. Et cela d’autant plus que nous étions séparés l’un de l’autre par la distance et par les circonstances. Il était peu probable que mes paroles vous parvinssent ; vous parviendraient-elles, il était peu probable que vous m’écoutiez. Et je risquais fort d’être pris pour un sot à vos yeux.

 

Mais récemment, M. le Gouverneur Général, en parlant de la situation de notre province, m’a conseillé de vous faire parvenir ceci : “qu’étant un homme respectueux de la loi morale, même si vous vous désintéressez de votre sort et de celui de votre famille, vous devez songer à sauver la population de toute cette région.”

 

Ces paroles, que M. le Gouverneur Général n’a confiées à personne, il me les a dites parce qu’il sait que nous sommes du même village, et que j’ai quelque chance de me faire écouter de vous.

 

Réfléchissez donc, je vous en prie. M. le Gouverneur Général qui est un étranger venu de loin, s’attendrit encore sur le sort de notre malheureux peuple. Nous qui sommes nés sur cette terre, la terre de nos parents, de nos familles, comment pourrions-nous y rester indifférents ? Que dirait-on de nous cent ans plustard ? Le devoir des dirigeants est d’avoir de la compassion pour les administrés, et je n’ai jamais vu qu’un dirigeant qui laisserait le peuple dans le malheur fut cité comme un sujet fidèle au souverain. Ce que vous avez fait jusqu’à présent est bien le fait d’un fidèle, mais à qui incombera la responsabilité des malheurs du peuple innocent ?

 

Vous avez parfaitement raison de me dire qu’un homme qui se dévoue pour le pays n’a pas à s’inquiéter du sort de sa famille. Oui, mais le sort de tant de familles de sa région, a-t-il le droit de le sacrifier ? J’ai bien peur que si vous perséverez dans votre chemin, toute cette région du fleuve Lam et de la montagne Hồng ne soit transformée entièrement en étangs, et pas seulement les arbres et les herbes de notre village Đông Thái.

 

J’ai longtemps examiné ce raisonnement, et l’ayant trouvé bon, je me réjouis en pensant que ces paroles loyales pourraient trouver le chemin de vos oreilles.

 

Cependant je sais que vous êtes dans la situation d’un homme monté sur l’échine d’un tigre féroce, et qui, même s’il le voulait, ne pourrait pas facilement en descendre.

 

Mais vous devez savoir que si je n’étais pas absolument sur de pouvoir vous faciliter cette opération, je n’oserais jamais vous la proposer en vous faisant courir un risque éventuel. Heureusement je suis en très bon termes avec M. le Gouverneur Général, ainsi qu’avec M. le Résident Supérieur à Huế et M. le Résident de France à Nghệ Tĩnh. Déjà j’ai pu obtenir la liberté de M. le Gouverneur de province Trần et de M. le Thị Lang Phan, nos concitoyens, qui avaient été condamnés l’un à la prison et l’autre à l’exil. Récemment encore, M. Phan Trọng Mưu est revenu faire sa soumission, et je l’ai amené devant les mandarins français qui l’accueillirent chaleureusement et télégraphièrent aussitôt à sa province natale pour que les tombeaux de ses ancêtres fussent respectés et ses trois fils libérés. Voyez combien le Protectorat est indulgent.

 

Si vous ne rejetez pas mes paroles comme oiseuses, je vous prie de me faire confiance entièrement. Je vous assure que je ne laisserai pas mon vieil ami d’avoir à se repentir d’être aveuglément confiant.

 Respectueusement.

 

Réponse de Phan Đình Phùng à Hoàng Cao Khải.

 

A son Excellence Hoàng,

 

Dans les forêts profondes où je me suis retiré à la suites d’opérations militaires, la tristesse m’a gagné pendant ces derniers jours de grand froid. Soudain une lettre de vous qu’on vient de m’apporter a fait s’évanouir cette tristesse. J’ai ouvert votre lettre et je vois que vous vouliez m’éclairer sur la route du salut et du péril, que non seulement vous vous préoccupiez de ma propre sécurité, mais aussi de celle de toute cette région. Ces paroles qui partaient de votre cœur, je les ai comprises, et quoique des milliers de lieues nous séparent, il me semble que nous sommes en train de causer face à face.

 

Cependant, il reste dans mon esprit et dans ma prise de position des points difficiles à exprimer. Certes, si l’on examine la situation générale du pays et les forces dont je dispose, il est clair, comme disaient les anciens, que je ressemble à la mante religieuse qui essayait d’arrêter un char avec ses bras.

 

Mais il faut se souvenir que notre pays s’est maintenu intact depuis mille ans grâce à sa culture. Notre territoire n’est pas étendu, notre armée n’est pas forte, nos ressources ne sont pas grandes. Si nous avons pu bâtir notre empire, c’est uniquement parce que nous l’avons bâti sur les fondations de la morale. Bien des fois, les Hán, les Đường, les Tống, les Nguyên ont cherché à s’emparer de notre pays pour en faire une province chinoise, mais ils ont tous échoué. La Chine cependant est notre voisine, mille fois plus puissante que nous. Pourquoi donc n’a-t-elle pas pu employer la force pour nous dévorer ? C’est parce que la volonté divine a décidé que le Việt Nam serait un pays indépendant, et aussi parce que les règles de morale qui guident notre peuple constituent un point d’appui inebranlable.

 

La France, elle, est séparée de notre pays par plusieurs dizaines de milliers de lieues de mer. En venant chez nous, les Français, pareils à un ouragan, ont forcé notre Souverain à s’enfuir, semant ainsi le désarroi dans toute la population. Et tout notre pays est tombé entre leurs mains ; le malheur s’étend à toutes les provinces, et pas seulement à celle-ci.

 

L’année Ất Dậu (1885), le char impérial s’est avancé jusqu’à la province frontière de Hà Tĩnh. Alors en deuil de ma mère, je me tenais enfermé chez moi, sans songer à faire quoi que ce fut. Mais comme j’appartiens à une famille de mandarins, Sa Majesté a bien voulu m’appeler à Son service, ce que je ne pouvais refuser. Récemment, Elle m’a encore confié le haut commandement de Ses troupes. C’était un ordre impérial ; pouvais-je m’y soustraire ? A ma place, le pourriez-vous?

 

Enchainé comme je suis par la confiance dont j’ai été honoré, je n’ai plus le droit de songer à la sécurité des miens, même si mon foyer devait rester éteint et désert. A plus forte raison je n’ai pas le droit de penser à la sécurité des autres. Et d’ailleurs, si notre province est tellement malheureuse, ce n’est pas tant à cause des faits de guerre. Là où arrivent les Français, de viles gens s’empressent de venir offrir leurs services pour satisfaire leurs haines et leurs intérêts personnels. Ils font condamner des innocents ; ils exploitent la population jusqu’à la moelle des os. Les français n’en savent rien ; comment notre peuple ne serait-il pas, dans ces conditions, plongé dans la plus noire misère ?

 

Nous sommes, vous et moi, nés dans cette province Hoan. A mille lieue de distance d’ici, vous songez encore avec compassion à votre contrée natale. Moi qui vois ces misères de mes propres yeux, comment pourrais-je y rester insensible ? Mais les circonstances m’obligent à suivre mon chemin, cependant que mes faibles forces ne me permettent pas de faire ce que je veux. Vous qui avez pitié de vos concitoyens, il vous suffira de vous mettre en pensée à ma place pour le comprendre. Qu’ai-je besoin de m’expliquer plus longuement ?

 

On remarquera que la lettre de Hoàng Cao Khải constitue un plaidoyer extrêmement habile :

1. Il commence par donner raison à son adversaire dont il admire le patriotisme.

2. Mais, vu l’écart écrasant des forces, ce patriotisme est parfaitement inutile, et ne peut aboutir qu’au désastre.

3. Pas seulement à Phan Đình Phùng dont il connait l’esprit de sacrifice, mais à la population innocente de toute une province. Il fait appel à l’humanité de son adversaire pour épargner ces sacrifices inutiles. Mieux encore, au nom de la morale, il lui reproche son inhumanité.

4. Enfin, il admet que Phan Đình Phùng ne pourrait pas déposer les armes même s’il le voulait, dans la crainte d’être abusé après sa soumission. Mais Hoàng Cao Khải se fait fort de lui réserver un accueil chaleureux de la part des Français, en citant des exemples de son intervention heureuse dans des cas semblables.

 

La réponse de Phan Đình Phùng n’est pas moindre habile :

 

1. Il apprécie le geste bienveillant de son ancien camarade.

2. Son mouvement de résistance n’est peut-être pas aussi inutile que le dit son interlocuteur. Depuis mille ans, le VN a traversé plusieurs épreuves aussi terribles, peut-être même plus terribles, de la part de la Chine, et toujours il est sorti victorieux grâce au patrotisme de ses enfants.

3. Les malheurs dont souffre la population ne proviennent pas exclusivement de la guerre, mais des exactions commises par les collaborateurs des Français (Hoàng Cao Khải est justement l’un d’eux).

4. A l’offre de services de Hoàng Cao Khải, Phan Đình Phùng répond par un refus dédaigneux.

 

C’est bien là la réponse d’un lettré. D’aucuns pourraient lui reprocher de s’être montré trop courtois envers un traître. Mais ce serait mal connaître la psychologie des lettrés de l’ancien temps qui dédaignaient la grossière insulte pour exprimer leur mépris dans un simple sourire. Il nous semble pourtant que la réponse de Phan Đình Phùng mériterait le reproche de traduire le découragement d’un patriote prêt à se sacrifier à une cause qu’il sait vouée à un échec certain. Nous sommes loin de l’énergie indomptable d’un Trần Bình Trọng repoussant les offres du Mongol victorieux par cette phrase superbe de dédain et de foi dans la victoire finale : “Plutôt mourir comme fantôme du pays du sud que d’être fait prince par la grâce du pays du Nord”.

 

Après l’échec de la manœuvre diplomatique de Hoàng cao Khải, les Français confièrent à Nguyễn Thân le soin de réduire Phan Đình Phùng par la force. Mais le vieux lettré était déjà miné par la dysenterie et succomba le 13/11/1895. Son tombeau sera profané par Nguyễn Thân, et son cadavre réduit en poussière dispersé dans le fleuve. Avant de mourir le farouche patriote composa ce poème : (Giai thoại làng Nho, p.158)

 

 戎 場 奉 命 十 更 冬

 Nhung trường phụng mạng thập canh đông, 

 武 力 依 然 未 奏 功

 Võ lực y nhiên vị tấu công.

 

 窮 戶 嗷 天 難 澤 雁

 Cùng hộ ngao thiên nan trạch nhạn

 匪 徒 遍 地 尚 屯 

  Phỉ đồ biến địa thượng đồn phong.

 九 重 車 駕 關 山 外

 Cửu trùng xa giá quan san ngoại,

 四 海 人 民 水 火 中

 Tứ hải nhân dân thủy hỏa trung.

 責 望 愈 隆 憂 愈 大

 Trách vọng dũ long ưu dũ đại,

 將 門 深 自 愧 英 雄

  Tướng môn thâm tự quý anh hùng.

 

 

Le texte est traduit en vietnamien par Lãng Nhân:

 

Nhung trường vâng mạng đã mười đông, 

Đánh dẹp dây dưa, chửa tấu công…

Dân khổ kêu trời vang ổ nhạn,

Quân gian dậy đất rộn đàn ong.

Chín trùng lận đận miền quan tái,

Trăm họ lầm than đám lửa hồng.

Trách vọng càng nhiều, càng cố gắng,

Tướng môn riêng thẹn tiếng anh hùng…

 

Ayant pris les armes, sur l’ordre de l’Empereur, depuis dix hivers,

Après de multiples campagnes je ne puis encore Lui rapporter la victoire.

Les cris de famine du peuple s’élèvent au ciel comme des piaillements d’hirondelles.

Cependant que sur terre les pirates exercent leurs ravages comme une nuée d’abeilles.

Le char impérial se traine péniblement sur les marches frontière,

Et le peuple se lamente dans son enfer de braise rouge.

Grande est ma responsabilité, que je ne saurais négliger.

Hélas ! ma honte est d’autant plus grande devant les héros.

 

Dans ce cri douloureux poussé avant sa mort, le patriote a songé en premier lieu au souverain dont il a trompé l’espérance, et au peuple qu’il n’a pas su protéger. Dans les deux derniers vers seulement, il s’est penché sur lui-même pour pleurer de honte d’avoir failli à son devoir. Pas un mot à l’adresse de sa famille exposée pourtant, après sa mort, à tous les périls. C’est bien là du vrai stoïcisme.

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