Chapitre XI: Contes Amusants

21 Tháng Năm 201412:46 SA(Xem: 5695)

Dans cette série, nous distinguons nettement deux groupes :

 

 

1.- Les histoires comiques proprement dites, qui font rire à propos de tout

: de l’avarice, de la paresse, de la fatuité, de la pusillanimité de certains maris, et surtout de l’instinct sexuel. Sur ce dernier point existe une très abondante littérature que nous devons, à notre grand regret, négliser en grande partie pour ne pas offenser la décence. La grivoiserie populaire vietnamienne est en effet souvent poussée à un degré surprenant qui laisse loin derrière elle les poèmes pourtant très osés de certains lettrés, de Hồ Xuân Hương notamment (Voir notre précédent ouvrage : Les Chefs d’œuvre de la littérature vietnamienne). C’est que, pour le commun peuple, il n’y a pas comme pour les lettrés de refoulement freudien. Il rit à gorge déployée de ses plaisanteries grivoises, purement verbales, heureusement, car en fait il se conduit en général très correctement.

2.- Les contes satiriques dirigés contre la classe des lettrés et les autorités. Contre les lettrés d’abord. Parmi les chansons nous avons connaissance

avec celle-ci :

Nhất sĩ nhì nông Hết gạo chạy rông Nhất nông nhì sĩ.

Dans la société, les lettrés se placent avant les agriculteurs, Mais le riz vient-il à manquer, les lettrés doivent courir partout pour en demander

Et reconnaître qu’ils passent après les agriculteurs.

 

 

Il ne faut pas y voir une animosité du paysan contre le lettré, qu’il vénère toujours. Mais le paysan a raison de mépriser et de railler les lettrés ignorants,


qui vivent en parasites aux dépens de leur famille et de la société, sous l’habit du maître d’école, du médicastre, du devin ou du sorcier.

 

 

La haine que voue le paysan aux autorités est plus consistante. Les institutions monarchiques sont d’importation chinoise, alors que le peuple Vietnamien vivait en clans autonomes sous l’autorité nominale des rois Hùng. Même après l’établissement d’un gouvernement central très fort, celui-ci a dû respecter l’autonomie des communes comme le prouve le proverbe :

 

 

Phép vua thua lệ làng

La loi du prince le cède à la coutume du village.

 

 

Néanmoins, des frictions restent inévitables entre la population rurale et les agents du Gouvernement central chargés de percevoir les impôts, de faire exécuter les corvées et de rendre la justice. C’est ce qui explique l’esprit révolutionnaire de certains contes.

 

 

 

 

Section I . - HISTOIRE COMIQUES PROPREMENT DITES De l’avarice

39. – Le poisson de bois .

 

 

Un avare, quoique riche, s’abstient de faire la moindre dépense qu’il considère comme superflue. À ses repas, il n’y a que du riz, rien que du riz. Jamais un morceau de viande, ni le moindre poisson. Cependant, pour donner le change à ceux qui viendraient le voir à l’heure du repas, il a fait confec- tionner un superbe poisson de bois qui trône majestueusement au milieu du plateau. Lui, sa femme et leurs trois enfants ont le droit de regarder ce poisson artificiel chaque fois qu’ils avalent une bouchée de riz, à titre d’assaisonnement. Mais une fois seulement par bouchée, pas plus !

 

 

Or le plus jeune fils, qui est gourmand, regarde trois fois le poisson de bois avant de se décider à avaler son riz. Il est surpris par son frère aîné qui se hâte de dénoncer sa manoeuvre déloyale (!)

- Père, le petit a regardé le poisson trois fois.


- Tanpis pour lui ! À manger trop salé, il mourra de soif !

 

 

 

 

De la paresse

 

 

40. – Plus fort que son maître !

 

 

Un paresseux s’étend au pied d’un figuier pour attendre que des figues tombent dans sa bouche. Beaucoup de figues sont éparpillées autour de lui, mais notre paresseux est trop paresseux pour les ramasser. Survient quelqu’un qui passe par là.

- Mon frère, dit le paresseux, soyez assez bon pour ramasser une de ces figues et la mettre dans ma bouche. Je meurs de faim.

 

 

Malheureusement notre paresseux est tombé sur un autre paresseux. Ne voulant pas se donner la fatigue de se courber jusqu’à terre, celui-ci ramasse une figue avec ses orteils et la met dans la bouche de l’autre. Béat d’admiration devant ce trait de génie, le premier paresseux demande à devenir le disciple du second.

 

 

Le lendemain, il apporte un régime de bananes chez son maîre afin d’en être reconnu solennellement comme disciple devant l’autel du Grand Sage Confucius. Mais il ne trouve aucune table pour y déposer les bananes.

- Je vais en umprunter une chez le voisin, dit le maître.

 

 

Ce serait trop fatiguant, riposte le disciple. Je courberai mon échine qui tiendra lieu de table.

 

 

Alors le maître se prosterne à ses pieds :

C’est vous qui devriez mon maître et moi votre disciple !

 

 

De la vanité

 

 

41.- Le porc du mariage et l’habit neuf .

 

 

Un vaniteux marie son fils. Le porc qui doit être sacrifié pour le festin de noces s’échappe. Notre homme court à sa recherche, et demande partout :


 

 

Il rencontre un autre vaniteux et lui posa la même question. Montrant son habit neuf, ce dernier lui répond :

- Depuis que je mis cet habit neuf, je n’ai rencontré aucun porc !

 

 

 

 

Des maris pusillanimes

 

 

42.- Si j’étais à sa place .

 

 

Deux voisins ont une même maladie : ils ont une sainte peur de leurs femmes. Un jour qu’il pleut, l’un d’eux oublie de rentrer les vêtements que sa femme a mis à sécher dans la cour. Les trouvant tout mouillés à son retour, celle-ci lui faisait une scène épouvantable.

Le voisin qui regarde cette scène pénible de son jardin, se met à jurer :

- Sacré nom d’un chien ! Si j’étais à sa place !

- Et qu’est-ce que tu ferais à sa place ? rugit sa femme qui a entendu cette réflexion aggressive. Dis un peu ce que tu ferais si tu étais à sa place ?

Mais j’aurais rentré les vêtements avant qu’il ne pleuve !

 

 

43.- La ligue des maris opprimés .

 

 

Dans un certain village, tous les maris ont peur de leurs femmes. Un jour, ils se convoquent en assemblée générale pour chercher un moyen de mettre fin à cette situation intolérable.

- Messieurs, dit l’un d’eux, si nous avons peur, c’est parce que nous sommes isolés, chacun chez soi. Réunissons-nous contre l’ennemi commun, et nous n’aurons plus peur.

- Oui, oui ! vocifèrent les autres avec enthousiasme.

- Je propose donc de constituer une ligue. Si l’un d’entre nous est maltraité par sa femme, tous les autres devront venir à son secours.

- Bravo ! Mais qui va être président de notre ligue ?

 

 

Après une heure de laborieuses délibérations, l’assemblée arrête unanimement son choix sur M. Râu Quặp (moustaches recourbées), le mari le plus pusillanime du village.


- Vive M. le président Râu Quặp ! Hip, hip, hourra !

 

 

Aussitôt l’assemblée décide d’organiser une grande cérémonie pour informer le Génie tutélaire du village de la constitution de la Ligue des Maris opprimés. Le temple communal est décoré splendidement avec des banières. Sur la table de l’autel, deux énormes bougies, hautes chacune d’un mètre, sont allumées, encadrant un brûle-parfum d’où s’échappe une épaisse fumée de santal. Et, élément indispensable de la fête, un plateau chargé de victuailles et de bouteilles d’alcool attend d’être servi aux ligueurs à la fin de la cérémonie.

 

 

Au son martial des coups de tambour et de gong s’avance Monsieur le Président de la Ligue sur la natte fleurie étalée devant l’autel. Revêtu de sa somptueueuse robe de cérémonie avec bonnet à aile de libellule et brodequins brodés, il s’agenouille majestueusement au milieu d’une double rangée de ligueurs se tenant respectueusement debout. La cérémonie va commencer.

 

 

Mais voici que des dames allant au marché, attirées par des coups de tam-tam, s’approchent du temple. À leur vue, tous les ligueurs, bravement, s’enfuient à toutes jambes. Puis, après avoir couru à perdre haleine, ils s’arrêtent pour respirer. Ils regardent vers le temple : Merveille ! leur président est resté agenouillé devant l’autel !

- Quel héroïque président nous avons choisi ! s’extasient-ils. Revenons pour le complimenter de son courage, et lui présenter des excuses pour notre couardise.

 

 

Et comme les dames, déçues de n’entendre plus les coups de tam-tam, se sont dirigées vers le marché, les ligueurs reviennent bravement au temple. Hélas ! leur président, qui n’a pas eu le temps de s’enfuir, est mort de frayeur à son poste !

 

 

 

 

44.- Un tour bien joué .

 

 

Un lettré a déjà échoué plusieurs fois à l’examen. C’est pourtant un lettré remarquable, doué d’une très bonne mémoire et d’un talent poétique hors pair. Mais soit par malchance, soit par la faute des tombeaux de ses ancêtres,


camp des examens, au milieu des coups de tam-tam et de l’admiration de la population. Cette fois-ci, il échoue encore. Sur le chemin du retour, il fait de tristes réflexions. Ce qu’il redoute par-dessus tout, c’est la colère de sa redoutable femme, qui ne manquera pas de lui faire des reproches sanglants. Comment les éviter ? Il s’avise alors d’un stratagème.

 

 

Il s’introduit nuitamment dans son jardin, grimpe sur un arbre, et crie à haute voix

- Femme une telle ! Je suis le Génie chargé des examens sur la Terre. Levez-vous, et venez écouter les décisions du Ciel.

 

 

La femme du lettré, réveillée en sursaut, se jette à genoux par terre.

- Monsieur le Génie, je suis à vos ordres.

- Je suis venu pour vous annoncer que votre mari sera reçu cette année.

- Béni soit le Ciel !

- Mais qu’il devra mourir immédiatement après, attendu que les bonnes actions de ses ancêtres ne sont pas suffisantes pour lui donner à la fois le succès et la longévité.

- Hi ! Hi ! Hi !

- Cependant il m’intéresse, parce qu’il a très bon caractère et que vous l’opprimez souvent injustement. N’est-ce point vrai ?

- Je m’en repens avec des larmes de sang, Monsieur le Génie. Ô mon pauvre mari, me pardonneras-tu ?

- Silence ! Vous êtes une mauvaise femme, et je devrais vous laisser

veuve.

- Hi ! Hi ! Hi !

- Cependant, vous dis-je, je m’intéresse à votre mari, et je voudrais le sauver. Si je le fais échouer à cet examen, il pourra avoir une longue vie et réussir au prochain examen. Allons ! quelle solution préférez-vous ? Qu’il

réussisse et qu’il meure immédiatement après, ou qu’il échoue et vive ?

- Oh ! Monsieur le bon Génie ! faites que mon mari échoue !

- Bien, femme une telle ! Votre mari échouera, et vivra.

 

 

Le malin lettré attend que sa femme rentre dans sa chambre pour sortir futivement de son jardin. Il s’accorde encore trois jours de vagabondage, puis rentre chez lui avec une mine lugubre.


Toutes mes copies ont été excellentes, je m’attendais déjà à être reçu premier licencié, et mon échec est absolument incompréhensible.

- Consolez-vous, mon ami, lui dit sa femme d’une voix douce. Vous l’avez échappé belle, et vous aurez pu mourir sans mon intervention.

- Comment cela ?

 

 

Candidement, sa femme lui raconte l’entrevue qu’elle a eue trois jours auparavant avec un génie. Sur ce, notre lettré se met dans une terrible colère

:

- Malheureuse ! qu’as-tu fait ? Tu m’as fait manquer ma licence !

- Paix ! paix ! notre homme ! A quoi vous servirait-il d’être reçu si vous deviez mourir après ?

- Eh ! je préfère être reçu et mourir, plutôt que subir la honte d’un échec immérité. Oh ! les femmes ! les femmes ! quels esprits bornés !

 

 

Enfin, après bien de douces paroles, et bien des excuses de sa femme, notre lettré consent à calmer son noble courroux. Le résultat, dont il rit sous cape, est qu’au lieu d’être sauvagement tancé par sa femme, il en reçoit mille soins touchants. L’alcool et les bons plats que sa femme lui allouait naguère chichement, il en a maintenant à tous ses repas. Et plus une parole aigredouce, plus une réflexion ironique de la part de sa femme ! De mégère acariâtre, celle-ci est devenue tout miel. N’est-elle pas coupable de l’échec de son mari ?

 

 

Celui-ci profite de cette atmosphère de paix pour travailler sérieusement. Et il réussit brillamment à l’examen suivant.

 

 

Un jour que les deux époux causent tranquillement dans leur yamen, car notre lettré est devenu un mandarin, celui-ci dit en souriant à sa femme :

- Vous savez, le génie qui vous a parlé cette nuit-là, et à qui vous demandiez mon échec.

- Eh bien ?

-C’était moi.

- Ah ! traître ! assasin ! Vous m’avez trompé indignement !

- Chut ! Ne craignez-vous pas que cette mystification dont vous fûtes victime ne soit ébruitée parmi mes administrés ?


 

 

Et tous deux se mettent à rire aux éclats.

 

 

 

 

Quelques histoires grivoises

 

 

45.- Une barbe trop touffue .

 

 

Un bourgeois n’ambitionne seule chose au monde : posséder une belle barbe. Hélas ! malgré tous les médicaments qu’il a pris, tant en usage interne qu’en usage externe, son visage reste désespérément glabre. Or notre bourgeois vient d’épouser une très jolie femme, et il veut qu’au moins son fils à naître acquière cet ornement splendide dont la nature l’a si cruellement frustré. Il s’en ouvre à sa femme.

- Ma chère, tu sais combien j’adore les belles barbes. J’en suis malheureusement dépourvu.

- Mais tu es très bien comme ça, avec ton visage glabre.

- Non. Tu me flatterais en vain, j’ai honte de n’avoir pas de barbe.

- Mais que pouvons-nous y faire ?

- Rien, malheureusement, du moins pour moi. Mais nous devons essayer d’acquérir pour notre fils à naître une belle barbe.

- Comment cela ?

- Eh bien ! je chercherai quelqu’un qui ait une belle barbe, et je l’inviterai à la faire germer avec toi pour notre fils.

- Mais tu es fou !

- Pas du tout. Femme, je le veux.

 

 

C’est tellement son idée fixe qu’à quelques jours de là, voyant passer devant sa porte un monsieur avec une superbe barbe, il l’invite courtoisement à entrer chez lui. Il lui fait servir un festin splendide, puis, au dessert, lui confie son chagrin de n’avoir pas de barbe, et son espoir de donner à son fils à naître cet ornement viril.

- Vous voudrez bien m’y aider, n’est-ce pas, mon cher hôte ?

- Soyez certain que je serais très heureux de vous rendre ce service, mais sincèrement, je ne vois pas comment . . .

- Veuillez passer un moment dans cette chambre. Ma femme vous y

attend.


 

 

Interloqué, l’étranger commence par refuser énergiquement cette offre incroyable. Puis, devant les prières réitérées du bourgeois et son sincère chagrin, il finit par accepter.

- Combien de touffes de barbe voulez-vous pour votre enfant ?

- Trois, Monsieur. Exactement comme vous.

- C’est bien. Je vais m’exécuter, mais croyez bien que c’est uniquement pour vous obliger.

- Nous vous en serons éternellement reconnaissants.

 

 

Le bourgeois introduit l’étranger dans la chambre de sa femme, et attend au dehors.

- Une touffe ! entend-il au bout d’un instant.

- Deux touffes !

- Trois touffes !

- Assez ! Je vous remercie. S’écrie le bourgeois. Sortez maintenant.

- Quatre ! Cinq ! Six ! continue avec fougue l’étranger.

- Assez ! assez vocifère le mari en enfonçant la porte de sa chambre. Je ne vous ai jamais demandé de façonner pour mon fils un visage entièrement couvert de poils !

 

 

46.- Le beau – frère entreprenant .

 

 

Une femme, qui a déjà un enfant, en met au monde un second. Elle demande à sa jeune soeur de venir chez elle pour s’occuper de l’aîné et des travaux du ménage à sa place pendant qu’elle est obligée de soigner le bébé.

 

 

Mais elle a compté sans son galopin de mari. Comment celui-ci pourrait- il résister à la beauté provocante de sa belle-soeur, avec son sourire en fossettes et ses yeux en amandes ? Une nuit donc, croyant tout le monde endormi, il rampe doucement vers le lit où sa belle-soeur dort avec son fils aîné.

 

 

Mais sa femme, qui donne le sein au bébé dans un lit voisin, s’en aperçoit. Elle chante :

Đêm khuya gà gáy o o,

Hỡi người quân tử kia bò đi đâu ?


Dans la nuit profonde coupée par le chant du coq, Ô vous qui rampez là, où voulez-vous aller ?

 

 

Pour se donner une contenance, l’époux répond effrontément :

Đêm khuya gà gáy o o

Anh ngủ chẳng được anh bò đi chơi.

Dans la nuit profonde coupée par le chant du coq, Ne pouvant m’endormir, je rampe pour m’amuser.

 

 

Quant à la jeune fille, étouffant un rire malicieux, elle chante pour bercer son neveu :

Cháu ơi, cháu ngủ cho no, Của dì, dì giữ, ai bò mặc ai !

Dodo, fais dodo, mon gentil neveu !

Mon bien, je le garde. Tantpis pour ceux qui rampent !

Section I I - CONTES SATIRIQUES Contre les lettrés ignorants

 

 

47.- Le poème du crapaud .

 

 

Trois sots lettrés qui se croient savants s’invitent mutuellement à aller dans le temple communal pour y composer des poèmes. Après avoir bu quelques tasses d’alcool, l’un d’eux s’écrie :

- Mes chers collègues, l’inspiration me monte déjà à la tête !

- À moi aussi !

- À moi aussi !

- Alors nous allons composer ensemble un poème.

- Mais sur quel sujet ?

- Tenez, voilà un crapaud qui s’avance. Excellent thème de poésie. Je vais improviser :

Con cóc trong hang

Con cóc nhảy ra.

Le crapaud, de son repaire,


Saute au dehors.

 

 

Le second poète enchaine aussitôt :

Con cóc nhảy ra

Con cóc ngồi đấy.

Le crapaud saute dehors

Et puis s’assied là

 

 

Au tour du troisième poète :

Con cóc ngồi đấy, Con cóc nhảy đi.

Le crapaud s’assied là, Puis s’en va en sautillant.

 

 

- Hourra ! Bravo ! Splendide ! s’écrient en chœur les trois poètes. Et ils se congratulent frénétiquement.

 

 

Brusquement l’un d’eux se met à sangloter.

- Mes chers frères, dit-il, nous avons épuisé la quintessence de notre génie pour composer ce poème admirable. J’ai bien peur que nous n’ayons plus longtemps à vivre. Hi ! hi ! hi !

- Hi ! hi ! hi ! Oui, vous avez raison, les grands génies poétiques comme nous ne sauraient avoir la vie longue. Hélas ! nous allons mourir jeunes.

 

 

À ces trois lamentations se joint bientôt une quatrième : celle du gardien du temple communal. Nos trois poètes, étonnés, lui demandent :

- Nous qui sommes des grands poètes, nous avons peur de mourir jeunes, et c’est pourquoi nous pleurons. Mais vous, pourquoi pleurez-vous aussi ?

- Messieurs, d’avoir écouté votre poème admirable, je crains aussi de n’y pouvoir survivre. Hi ! hi ! hi !

 

 

 

 

48.- Parce que c’est comme ça .

 

 

Un riche propriétaire a deux filles ; il marie l’aînée à un paysan et la cadette à un étudiant.


Un jour, voulant mettre en valeur le savoir de ce dernier, et railler l’ignorance du premier, il les emmène en promenade. Rencontrant en chemin une oie qui pousse des cris perçants, il demande à ses deux gendres la raison pour laquelle l’oie a une voix si puissante.

- Parce qu’elle a un long cou, répond l’étudiant.

- Parce que c’est comme ça, répond le paysan.

 

 

Plus loin, il rencontrent une bande de canards qui s’ébattent dans une mare.

- Pourquoi les canards peuvent-ils nager ? demande le beau-père .

- Parce qu’ils ont des plumes et peu de chair, répond l’étudiant.

- Parce que c’est comme ça, répond le paysan.

 

 

Plus loin encore, il trouvent au bord du chemin une pierre fendue en deux.

- Pourquoi cette pierre n’est-elle pas entière ? demande le beau-père.

- Parce que la foudre ou quelque cantonnier l’a fendue.

- Parce que c’est comme ça, répond le paysan.

 

 

De retour à la maison, le beau-père ne cesse de complimenter son gendre cadet pour son grand savoir, et de railler son gendre aîné pour son ignorance. Furieux, celui-ci s’adresse à son co-beau-frère :

-Tu dis que l’oie a une voix puissante parce qu’elle a un long cou. Mais le crapaud-buffle n’a pas de cou ; pourquoi crie-t-il aussi si fort ? Tu dis que le canard peut nager parce qu’il a des plumes et peu de chair. Mais la barque qui n’a ni plumes ni chair flotte aussi. Et quant à la pierre fendue, quelle sotte explication en as-tu donné ! Le ventre de ta mère d’où tu es sorti, a-t-il été aussi fendu par la foudre ou par ton père ? D’après moi, les choses sont comme ça parce que c’est comme ça. Et ton savoir livresque n’est que pure élucubration.

 

 

 

 

49.- Le poème du cheval blanc .

 

 

Un mandarin féru de littérature a pour habitude d’éprouver le talent des lettrés indigents qui viennent frapper à sa porte. S’ils se montrent bons poètes il les gratifie généreusement.


 

 

Un jour, deux étudiants se présentent en même temps devant lui.

- Qui veut commencer le premier ? demande le mandarin.

- Moi, Excellence, dit l’un.

- Décrivez alors ce cheval blanc qui est attaché là, à ma porte.

 

 

Après une minute de réflexion, le premier étudiant déclame :

Bạch mã mao như tuyết Tứ túc cương như thiết. Tướng công kỵ bạch mã,

Bạch mã tẩu như phi.

Son pelage est blanc comme de la neige Et ses quatre pattes dures comme du fer. Son Excellence monte sur son échine,

Et il galope comme s’il avait des ailes.

 

 

- Très bien, dit le mandarin. Voici une ligature pour vous. Quant à vous, continue-t-il en regardant le second étudiant, vous me ferez le portrait de cette vieille femme qui vient justement d’entrer, pour me demander sans doute de l’aumône.

 

 

Très perplexe, l’étudiant finit par déclamer, après avoir cherché vainement d’autres rimes :

Bà lão mao như tuyết Tứ túc cương như thiết. Tướng công kỵ bà lão, Bà lão kêu chí chết !

Son poil est blanc comme de la neige,

Et ses quatre membre durs comme du fer.

Son Excellence monte sur son échine,

Et elle hurle de douleur comme si elle allait mourir !

 

 

- Insolent ! vocifère le mandarin. Gardes, saisissez-le et donnez-lui vingt coups de rotin.

 

 

 

 

50. - Une joute littéraire .


 

 

Un riche bourgeois a une fille à marier. Trois prétendants se présentent pour demander la main de la belle demoiselle. Le bourgeois, qui veut avoir un gendre bon lettré, leur donne un poème à composer.

- Regardez bien ce cheval que j’ai là. Celui d’entre vous qui fera sur ce sujet le meilleur poème aura ma fille.

 

 

Le premier prétendant, voyant une aiguille posée sur la table, s’en inspire aussitôt :

Mặt nước để cái kim, Ngựa ông chạy như chim. Chạy đi rồi chạy lại,

Cái kim vẫn chưa chìm. Pendant que je pose sur l’eau une aiguille, Votre cheval galope comme un oiseau.

Il galope tellement vite

Que l’aiguille n’a pas le temps d’être immergée.

 

 

- Hum ! Votre image n’est pas poétique. Et vous autres ?

 

 

Le second prétendant cherche autour de lui son inspiration. Enfin il voit près de là un petit fourneau qui sert à faire bouillir de l’eau pour le thé. Il déclame aussitôt :

Lửa đỏ để cái lông Ngựa ông chạy như rông. Chạy đi rồi chạy lại,

Cái lông vẫn chưa hồng.

Pendant que je pose sur le fourneau une plume, Votre cheval galope comme un ouragan.

Il galope tellement vite

Que la plume n’a pas le temps d’être brulée.

 

 

- Hum ! Hum ! Pas trop bonne, votre comparaison. Et vous là ?

 

 

Le malheureux dernier prétendant s’arrache les cheveux de désespoir. Il a beau écarquiller ses yeux, il ne trouve plus rien pour alimenter son inspi- ration. Heureusement sa future belle-mère, du moins il l’espère, fait entendre


tout à coup un petit bruit sonore. Probablement a-t-elle été secouée d’un rire inextinguible par les deux poèmes extraordinaires qu’elle vient d’entendre, et ne trouve plus la force de retenir le mouvement involontaire de ses intestins. Ce petit bruit sonore sauve pourtant notre poète qui enchaîne aussitôt :

 

 

Ngã mẫu đánh cái rít Ngựa ông chạy như hít. Chạy đi rồi chạy lại

Cái đít vẫn chưa khít. Pendant que maman fait un p . . Votre cheval galope comme le vent. Il galope tellement vite

Que le derrière de maman n’a pas le temps de se fermer !

 

 

L’histoie ne dit pas à lequel des trois poètes le riche bourgeois a accordé la main de sa fille.

 

 

Contre les parasites de la société

 

 

51. - Le sorcier .

 

 

Un homme fait métier de sorcier. D’après ses vantardises, il commanderait à tous les diables de l’enfer, et pourrait convoquer à sa guise tous les génies du ciel, de la terre et des eaux. Mais s’il en impose à ses clients, il ne réussit pas à se faire prendre au sérieux par sa femme qui lui dit un jour :

- Tu qui es sorcier, est-ce que tu as peur des fantômes, quelquefois ?

- Femme ignorante ! Les fantômes, mais ce sont mes domestiques. Comment oseraient-ils me faire peur ?

 

 

Un autre jour, le sorcier, après avoir exercé son métier dans un village voisin, rentre chez lui fort tard. Il emporte dans un sac de nombreuses victuailles que lui a offertes son client : une tête de porc cuit, un régime de bananes et une dizaine de boulettes de riz gluant. Quand notre sorcier pousse la porte du jardin, il voit danser devant ses yeux une lueur rougeoyante. C’est sa femme, tapie dans l’obscurité, qui brandit un tison enflammé. Flageolant de terreur, notre sorcier bégaie précipiteamment :


- Retro, Satana ! Retro, Satana !

 

 

Mais loin de reculer, le diable rougeoyant s’approche de plus en plus. Alors le sorcier s’enfuit bravement à toutes jambes, laissant tomber par terre son sac de victuailles.

 

 

Il n’ose rentrer chez lui que le lendemain matin. Sa femme l’accueille joyeusement et lui sert un repas magnifique composé d’une tête de porc, de boulettes de riz gluant et de bananes que notre sorcier regarde d’un air étonné en murmurant :

- Mais, mais, cette tête de porc ressemble à ma tête de porc. Et ce régime de bananes ressemble à mon régime de bananes . . .

-Mais à quoi veux-tu qu’une tête de porc ressemble, si ce n’est à une tête de porc ? éclate de rire sa femme. Veux-tu dire qu’elle ressemble à ton

fantôme de la nuit dernière ?

Maître sorcier comprend qu’il a été dupé par sa femme, et désormais n’ose plus se vanter de son pouvoir sur les esprits.

 

 

52- Le médicastre .

 

 

Le Roi de l’Enfer tomba un jour malade. Grande consternation au royaume des Neuf Sources : il ne s’y trouvait aucun médecin capable de le guérir.

- Sire, dit un conseiller à la barbe vénérable, pourquoi ne feriez-vous pas appel à un médecin du monde des vivants ?

- Vous avez raison. Mais qui allons-nous inviter ? Il ne faudrait pas tomber sur un ignorant.

- J’ai un moyen infaillible, Sire, pour découvrir le meilleur médecin de la

Terre.

- Ah ? dites-le moi.

- Votre Majesté sait que les malades envoyés chez nous par l’ignorance des médecins reviennent sur Terre pour stationner devant la porte de leur assasin involontaire ?

- Oui. Et alors ?

-Eh bien ! le médecin qui a le moins de fantômes devant sa porte est indubitablement le meilleur.


- Oh ! quelle ingénieuse idée vous avez là ! Donnez des ordres à un diable pour qu’il aille immédiatement me quérir ce fameux médecin.

 

 

Un diable fut donc envoyé sur Terre. Mais en visitant les demeures des médecins, il trouvait devant chacune d’elles une foule immense de fantômes. Il allait se décourager lorsqu’il arriva enfin chez un médecin devant la porte duquel stationnaient seulement deux fantômes.

- Voilà mon homme ! se dit le diable. Et il enleva l’âme de ce médecin à l’Enfer.

- Bonjour, cher Maître, dit le Roi des ténèbres. Il parait que vous exercez la médecine.

- Oui, Sire, depuis ce matin.

- Comment, depuis ce matin seulement ?

- Oui, Votre Majesté, je n’ai donné mes soins qu’à deux clients.

- Et vous les avez tué tous les deux ? Holà ? diables ! Ramenez-le vite sur

Terre.

 

 

Contre les grands

 

 

Nguyễn Quỳnh vivait sous la dynastie des Lê, au moment où le seigneur Trịnh accaparait à lui tout le pouvoir réel. Quỳnh détestait le dictateur, mais n’osait pas s’attaquer ouvertement à lui. Il cherchait donc à le contrarier ou même à le ridiculiser sans trop de danger dans divers incidents où il mettait toujours les rieurs de son côté. La légende amplifia ses exploits, lui en prêta même d’imaginaires, pour faire de lui le champion de la résistance populaire contre les grands du monde.

 

 

Ci-dessous nous reproduisons trois de ces anecdotes savoureuses.

 

 

53- Le chat volé .

 

 

Le seigneur Trịnh avait un très beau chat, qu’il nourrissait exclusivement de mets recherchés. Quỳnh décida de s’en emparer. Il le vola subrepticement, puis l’enferma chez lui. À l’heure des repas, il plaçait côte à côte deux assiettes, l’une contenant de la viande et du poisson, l’autre du riz et des légumes. Chaque fois que le chat, habitué à une nourriture exquise, allait vers la première assiette, Quỳnh le fouettait vigoureusement. Au bout d’un mois de


 

 

Alors Quỳnh promena ostensiblement “son” chat pour se faire voir des eunuques du seigneur Trịnh. Averti, celui-ci le fit venir :

- J’ai appris, Quỳnh, que vous avez pris mon chat.

- Votre Altesse aura été abusée. Mon chat, je l’ai acheté au marché.

- Bon, faites-le venir ici, nous verrons bien.

 

 

Quỳnh amena son chat au palais.

- Mais c’est bien mon chat, s’écria le prince.

- J’en demande humblement pardon à Votre Altesse, mais c’est le mien.

- Tout de même, ce museau, ces yeux, ce sont bien ceux de mon chat.

- Il y aurait un moyen, Votre Altesse, pour savoir à qui appartient ce chat.

- Dites.

- Votre Altesse pense-t-elle que les animaux domestiques sont habituées au régime alimentaire de leur maître ?

- Mais oui.

- Daignez donc faire apporter deux assiettes, l’une contenant des mets recherchés de votre cuisine, l’autre du riz et des légumes. Si ce chat va à la première assiette, il appartient à Votre Altesse, indubitablement. Mais s’il va à la seconde, c’est qu’il appartient à votre humble sujet qui n’a guère les moyens de manger de la viande à ses repas, et qui à plus forte raison ne peut offrir à son chat cet aliment de luxe.

- Oui, vous avez raison. Eunuques, qu’on fasse l’épreuve proposée par

Quỳnh.

 

 

L’épreuve, comme on doit s’y attendre, aboutit à la confusion du prince. Quỳnh emporta “son” chat en glorifiant hautement la “claivoyance” divine de son Seigneur.

 

 

 

 

- Le coq castré .

 

 

Quỳnh apprit que le chef des eunuques du Palais Seigneurial avait un coq de combat célèbre. Pour lui donner une leçon, il fit répandre le bruit qu’il avait, lui aussi, un coq de combat redoutable. Le chef des eunuques s’amena


aussitôt chez Quỳnh pour le défier. Après s’être récusé hypocritement plusieurs fois sous prétexte que son coq ne valait rien, Quỳnh finit par accepter le pari.

 

 

Le jour venu, il apporta un énorme coq castré, que d’un coup de bec le coq adverse fit fuir honteusement, aux éclats de rire triomphants de l’eunuque. Quỳnh ramassa son coq blessé, et lui dit railleusement :

- Pauvre castré ! Tu aurais du cacher ton ignominie. Mais tu as voulu faire le fier, et voilà ce qui t’attend.

 

 

Le chef des eunuques interrompit son rire triomphant, et s’esquiva furtivement sans réclamer le montant du pari.

 

 

 

 

54- Le chou miraculeux .

 

 

Pour se vanger d’une insolence de Quỳnh, le seigneur Trịnh ordonna à ses soldats d’aller . . . se soulager dans la maison du turbulent mandarin.

 

 

Un mois après, Quỳnh alla au marché acheter un chou superbe, et vint d’offrir au seigneur Trịnh.

- Que Votre Altesse daigne accepter cet indigne présent de son très humble sujet.

- Oh ! mais il est superbe, ce chou. Où était-il planté ?

- Chez moi, Votre Altesse. C’était un chou tout à fait ordinaire. Mais grâce aux engrais donnés généreusement par vos gardes, il s’est développé prodigieusement.

- Remportez-le, vite ! s’écria le seigneur Trịnh, rouge de colère.

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