Nguyễn Đình Chiểu

21 Tháng Năm 20143:08 SA(Xem: 6796)

N G U Y Ễ N Đ Ì N H C H I Ể U

(1822 – 1888)

 

Si Nguyễn Công Trứ représenta le type du lettré grand seigneur, aussi ardent aux plaisirs qu’au service du pays, attaché aux grands principes de l’enseignement confucéen mais peu soucieux d’observer les règles tatillonnes de la morale bourgeoise, si Cao Bá Quát fut plus progressiste encore en prenant la cause du peuple contre le prince, en défendant l’émancipation de l’individu contre la contrainte sociale, Nguyễn Đình Chiểu était resté un adepte du Confucianisme le plus farouche.

 

Originaire du village de Tân Khanh, province de Gia Định, il fur reçu bachelier en 1843. En 1846 il était en Huế en attendant de se présenter au prochain examen lorsqu’il reçut la nouvelle de la mort de sa mère. Il revient aussitôt à Gia Định pour en prendre le deuil, mais il pleurait tellement qu’il en perdit la vue. Forcé ainsi d’abandonner tout espoir de parvenir au mandarinat, il ouvrit une école que fréquentaient de nombreux étudiants conquis par son vaste savoir.

 

Ce fut qu’à l’instar de beaucoup d’autres écrivaints, il composa le fameux roman en vers Lục Vân Tiên où il prêta à son héros ses propres idées et même les épreuves qu’il avait subies dans la vie.

 

Lục Vân Tiên est un étudiant modèle. Après avoir terminé ses études, il rentre chez lui. En cours de route, il a l’occasion de délivrer des pirates une jeune fille, Kiều Nguyệt Nga. Celle-ci le remercie, et lui demande de l’accompagner chez son père, préfet de Hà Khê, pour en être récompensé dignement. Lục Vân Tiên refuge. En désespoir de cause, la jeune fille compose un poème pour exprimer sa gratitude. Lục Vân Tiên répond par un poème aussi gracieux, et les deux jeunes gens se quittent gentiment, lui sans aucune arrière-pensée, mais elle déjà éperdument amoureuse de son héros.

 

Rentré ches lui, Vân Tiên apprend de ses parents qu’il est fiancé à Vũ Thế Loan. Il va la voir, et ils se jurent une fidélité éternelle. Puis Vân Tiên se rend à la Capitale pour se présenter à l’examen qui va y avoir lieu. Mais il reçoit la nouvelle que sa mère est morte ; aussi est-il obligé d’abandonner son examen pour rentrer prendre le deuil. En cours de route, il pleure tellement qu’il en devient aveugle. Un camarade jaloux le jette dans le fleuve. Il en est sauvé miraculeusement par un pêcheur et emmené chez sa belle-famille qui, le voyant aveugle, l’abandonne dans une grotte. Encore une fois, il est sauvé miraculeusement et rencontre un bon ami qui l’héberge.

 

De son côté, Kiều Nguyệt Nga traverse aussi mille épreuves. En rentrant chez elle, elle raconte à son père sa capture par les brigands, et sa délivrance par Lục Vân Tiên dont elle a dessiné de mémoire le portrait. Elle demande à l’épouser. Condescendant, M.Kiều écrit à M. Lục (père de Vân Tiên) pour l’inviter à venir le voir. Mais M. Lục a reçu de mauvaise nouvelles de son fils qui serait mort sur le chemin du retour. Grand désespoir de Nguyệt Nga qui jure de garder le veuvage.

 

Cependant, le fils du premier ministre la demande en mariage. Refus de M. Kiều. Courroucé, le premier ministre suggère au roi d’offrir la belle Kiều Nguyệt Nga au chef des Barbares qui attaquent la frontière pour avoir la paix. En cours de route Nguyệt Nga se jette dans le fleuve pour rester fidèle à son amour. La bodhisattva Quán Âm la transporte dans le jardin d’un vieux mandarin qui l’adopte. Mais le fils de celui-ci s’éprend d’elle et l’adjure de l’épouser. Elle s’enfuit de nouveau et est recueillie par une bonne femme.

 

Revenons maintenant à Lục Vân Tiên. Il recouvre la vue grâce à un génie, est reçu premier docteur, reçoit le commandement des troupes pour aller défendre la frontière, réussit à tuer le général des Barbares, et retrouve Nguyệt Nga dans une paillote. Il la ramène triomphalement à la Cour. Le roi le récompense magnifiquement, châtie le premier ministre traître et l’ami félon. Quant à Vũ Thể Loan, la fiancée parjure, elle est dévorée par un tigre.

 

Comme on le voit, cette histoire, d’où nous avons extirpé déjà beaucoup de péripéties secondaires, est passablement alambiquée. Lục Vân Tiên est bien le type du roman ancien en vers par son but moralisateur, par son intrigue entortillée et surtout par le comportement mécanique de ses personnages qui parlent et agissent comme dans les livres. Il est patent cependant qu’il a connu et connaît encore une grande vogue dans la masse du peuple.

 

Comment expliquer ce paradoxe ? ou plutôt ce pseudo-paradoxe car ce qui apparaît à notre goût moderne comme des défauts apparaissent et même continue à apparaître à certains de nos compatriotes comme des qualités.

 

Glissons sur le but moralisateur du roman, dont personne ne conteste la légitimité. Son dénouement édifiant est plus contestable, car il exige des interventions miraculeuses, mais enfin, cela satisfait le sentiment de justice qui sommeille en chacun de nous. Parmis les romans modernes, les romans policiers et les romans d’aventures ne continuent-ils pas à adopter cette tradition ? Les dénouements malheureux ne se rencontrent que dans les romans socio-psychologiques modernes pour mieux exciter la pitié, la colère ou l’indignation. C’est au fond le même but moralisateur, mais poursuivi avec des moyens opposés.

 

Pour celui qui est habitué à admirer la simplicité majestueuse d’une tragédie de Racine, l’intrigue entortillée de Lục Vân Tiên a quelque chose de vraiment pénible, mais l’admirateur des romans d’A. Dumas père s’en accommodera très bien. ce n’est donc qu’une affaire de gout dont il ne faut pas trop discuter. La majorité du peuple viêtnamien, ne l’oublions pas, vivait paisiblement au fond de ses villages, au milieu des rizières et des buffles, une vie absolument sans histoire, sans imprévu. Plus un récit est compliqué d’aventures, et mieux par conséquent il sera accueilli pour combler le vide de la vie terre-à-terre de ses lecteurs.

 

Le seul défaut que nous puissions à juste titre reprocher à Lục Vân Tiên, c’est de faire agir ses personnages comme des automates. A ce point de vue, sa comparaison avec le Đoạn Trường Tân Thanh de Nguyễn Du est réellement désastreuse. Autant Thúy Kiều, Kim Trọng, Thúc Sinh, Hoạn Thư, Từ Hải sont vivants, autant Vân Tiên, Nguyệt Nga, Thể Loan, le pêcheur, le bûcheron, etc . . . , sont des entités mortes.On ne décèle dans leurs paroles, dans leurs douleurs même, aucune étincelle de vie. Lục Vân Tiên, ce n’est pas une tranche de vie, mais une leçon de philosophie, ou pis encore une leçon de morale, dogmatique et plutôt sèche. Et c’est par là, ô paradoxe, qu’il plait, ou plutôt plaisait tant au Viêtnamien d’autrefois. La vie rustique qu’il menait en faisait un être rustique, proche de la nature et éloigné des malices de la vie civilisée. Et il était naturel qu’il aimât à entendre les préceptes de la morale confucéenne dont il était imprégné dans la bouche des héros de roman. Une leçon de morale pratique mise en vers, c’était ce qui l’enchantait ; quant à la psychologie des personnages, il ne s’en souciait pas outre mesure, ou plutôt était incapable d’en apprécier toute la finesse comme les lettrés. C’est pourquoi le Đoạn trường tân thanh demeura l’œuvre de prédilection des esprits cultivés, tandis que le Lục Vân Tiên réunit les suffrages des cœurs simples.

 

Ci-dessous nous allons reproduire quelques passages de ce roman long de 2.076 vers, qui montrent à la fois le caractère factice des personnages, et la valeur littéraire d’un style qui parvient à la beauté non par la recherche mais par la simplicité.

 

Voici le pêcheur qui s’adresse à Vân Tiên après l’avoir sauvé des eaux :

 

965. – Nước trong rửa ruột sạch trơn,

Một câu danh lợi chi sờn lòng đây.

 Rày doi, mai vịnh vui vầy,

Ngày kia hứng gió, đêm này chơi trăng.

 Một mình thong thả làm ăn,

Khỏe quơ chày kéo, mệt quăng câu dầm.

 Nghêu ngao nay chích mai đầm,

Một bầu trời đất vui thầm ai hay.

 Kinh luân đã sẵn trong tay,

Thung dung dưới thế vui say trong trời. 

 Thuyền nan một chiếc ở đời,

Tắm mưa chải gió trong vời Hàn giang.

 

L’eau pure a lavé entièrement mes entrailles,

Les honneurs et richesses ne sauraient plus toucher mon cœur.

Tantôt je me plais à chanter en vers la beauté du jambosier et de l’abricotier,

Et tantôt je jouis de la fraicheur du vent ou de l’éclat de la lune.

Tout doucement je gagne ma vie

En tendant de filets quand je suis en forme, ou en pêchant à la ligne quand je suis fatigué.

Dans les arroyos et les étangs je flâne

Sans que personne au monde connaise ma joie intérieure.

Je tiens tout prêt entre mes mains le talent de pacifier le royaume,

Mais je ne veux que jouir des loisirs sur la terre, et trouver du plaisir dans l’ivresse sous le ciel.

Seul au monde avec ma barque de bambou,

J’affronte pluies et vents sur le fleuve Hàn giang.

 

Le bûcheron n’a pas un idéal moins élevé :

 

1139. – Tiều rằng : Vốn lão tình không,

Một mình ngơ ngẩn non tòng hôm mai.

 Tấm lòng chẳng muốn của ai,

Lánh nơi danh lợi chông gai cực lòng.

 Kìa non, nọ nước thong dong,

Trăng thanh gió mát bạn cùng huơu nai.

 Công hầu phú quý mặc ai,

Lộc rừng gánh vác hai vai tháng ngày.

 

Le bûcheron répond : Je n’ai aucune attache dans la vie,

Soir et maitn, je flâne librement parmi les monts plantés de pins.

Je ne veux rien accepter de personne,

Ni honneurs ni richesses, qui ont seulement des piquets et des épines dressés pour faire notre malheur.

N’ai-je pas les eaux et les montagnes qui m’abritent paisiblement,

La lune brillante, le vent frais, les daims et les biches pour compagnons ?

Laissant aux autres le soin de courir après duchés et marquisats,

Je me contente de charger les dons de la forêt sur mes deux épaules durant toute ma vie.

 

Voici la scène du suicide de Nguyệt Nga, qui rappelle celle du suicide de Thúy Kiều :

1487. – Đêm nay chẳng biết đêm nào,

Bóng trăng vằng vặc, bóng sao mờ mờ.

 Trên trời lặng lẽ như tờ,

Nguyệt Nga nhớ nỗi tóc tơ chẳng tròn.

 Than rằng : Nọ nước kìa non,

Cảnh thời thấy đó, người còn về đâu ?

 Quân hầu đều đã ngủ lâu,

Lén ra mở bức rèm châu một mình :

 Vắng người có bóng trăng thanh,

Trăm năm xin gửi chút tình lại đây.

 Vân Tiên anh hỡi có hay,

Thiếp nguyền một tấm lòng ngay với chàng.

 Than rồi lấy tượng vai mang,

Nhắm chừng nước chảy vội vàng nhẩy ngay.

 

Quelle est cette nuit

De lune inondée, avec des étoiles pâlissantes

Dans le ciel morne de silence ?

Pensant à son amour inachevé

Nguyệt Nga soupire : “Voici des eaux, et voilà des monts,

La nature n’a pas changé, mais où est mon bien-aimée ?”

Profitant de ce que ses gardes sont plongés dans le sommet,

Elle écarte doucement le store de perles qui obture l’entrée de la barque.

“Mon bien-aimé n’est pas là, mais la lune est présente

A qui je confie la suprême preuve de mon amour.

Ô Vân Tiên, le sais-tu ?

J’ai juré de te garder intact mon cœur loyal .”

Ayant soupiré, le portrait attaché à ses épaules,

Elle se jette brusquement dans le courant du fleuve.

 

La scène de la fuite de Nguyệt Nga rappelle aussi celle de la fuite de Thúy Kiều :

1641. – Hai bên bờ bụi rậm rì,

Đêm khuya vắng vẻ gặp khi trăng lờ.

 Lạ chừng đường sá bơ vơ,

Có bầy đom đóm sáng nhờ đi theo.

 Qua truông rồi lại lên đèo,

Dế kêu giắng giỏi, sương gieo lạnh lùng.

 

Sur la route bordée de buissons épais,

Par une nuit silencieuse et sans lune,

Elle va à l’aventure sur des chemins inconnus,

Guidée seulement par des vers luisants,

Traversant des maquis, escaladant des cols,

Au milieu du chant des grillons, et sous la rosée glaciale qui tombe.

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